Ferguson, New-York, Cleveland, et aujourd’hui Baltimore. Ces villes américaines ont de commun des violences commises par les forces de l’ordre à l’égard de Noirs entrainant la mort. Pourtant, ces violences perpétuées envers la communauté noire américaine marquent une réalité qui ne choque plus personne là-bas puisque devenue habituelle. La différence ici se fait dans le traitement de ces actes: les policiers auteurs de ces crimes s’en sortent généralement sans poursuites judiciaires puisqu’ils font bien souvent membre d’une administration blanche au pouvoir quasi absolu dans des villes où les Noirs sont pourtant majoritaires.
Le mois dernier marque un mois d’affrontements à Baltimore, où relation entre forces de l’ordre et communauté noire est déjà compliquée depuis des années. Les choses se sont envenimées dans la petite ville du Maryland suite à la mort de Freddie Gray, ce jeune homme de 25 ans mort des suites de ses blessures causées par six policiers lors de son arrestation. Au même titre que les habitants de Ferguson qui manifestaient eux aussi suite à la mort de Michael Brown l’été dernier, tous réclament que justice soit faite et scande le même slogan : (la vie des Noirs compte)
Les différents affrontements de ces derniers mois ont des étranges airs d’un nouvel avril 1968 où plusieurs émeutes avaient éclaté dans le pays suite à la mort du Dr. Martin Luther King, le fervent défenseur des droits civiques. Aujourd’hui, c’est au tour des célébrités de s’en mêler: que ça soit à travers des films, des séries télés, des chansons ou même des tweets, les personnalités afro-américaines influentes s’allient aux habitants de ces villes pour réclamer la justice.
DE SELMA À SCANDAL, DE KING À POPE
Pour ceux qui ont vu le film Selma (pour les autres allez-y vite), d retraçant la lutte historique menée par le Dr Martin Luther King dans la ville de Selma, pour garantir le droit de vote à tous les citoyens, vous vous rappellerez surement de cette scène: après un rassemblement de citoyens noirs dans les rues de Selma venus défendre leur droit, des affrontements éclatent entre des Noirs non armés et des forces de l’ordre sur-armés. Ici, Ava DuVernay choisit de suivre Jimmie Lee Jackson, un jeune homme noir (incarné par Keith Stanfield) qui, tentant de s’enfuir avec sa mère et son grand-père, se réfugie dans un restaurant avant de se faire tabasser puis froidement abattre par un policier blanc. Une scène qui fait bien sûr écho aux morts de Michael Brown, Freddie Gray, Tamir Rice ou bien encore Éric Garner. Ces « histoires » ont pourtant 50 ans d’écart, mais malgré une lutte pour les droits civiques de plusieurs années, la situation ne semble pas vraiment changée aux États-Unis.
En réalisant ce film, DuVernay ne pensait surement pas que certaines scènes de son film puissent se référer à de réelles scènes de vie d’aujourd’hui. — créatrice notamment des séries Grey’s Anatomy, Scandal et How to Get away with Murder — a quant à elle choisit délibérément de s’inspirer de l’affaire Ferguson dans un épisode de sa série Scandal. Diffusé le 5 mars dernier, « The Lawn Chair » met Olivia Pope face à un homme noir dont le fils a été abattu en pleine rue par un agent de police. Un énième meurtre qui mobilise tout un quartier mais un énième meurtre qui oppose surtout la police à la population noire et qui rappelle donc les émeutes survenues pendant plusieurs jours après la mort de Michael Brown, le 9 août 2014. Sauf que dans cet épisode, Olivia parvient (comme toujours) à régler le problème et obtient que justice soit faite. Une fin heureuse certes mais qui est bien loin de ce qui se trame en réalité. Les séries télévisées sont le reflet de notre société, Shonda Rhimes a voulu exprimer son soutien à travers ce qu’elle sait faire de mieux : des scénarios ficelés d’une main de maitre, pour nous livrer un récit quasi réel de ce qui se passe bien trop souvent dans les villes américaines.
QUAND LES STARS S’EN MELENT
Passé le domaine télévisuel, c’est sur les réseaux sociaux que la mobilisation se fait la plus forte. Les hashtag #BlackLivesMatter qui ont surgi cet été, et apparus lors des émeutes de Baltimore ont inondé Twitter, Facebook et même Instagram. C’est aussi sur ces mêmes réseaux que les célébrités afro-américaines s’expriment et font passer un message de paix.
Avec ses plus de 18 millions de fans sur Instagram, la chanteuse a partagé cette photo de Devin Allen, un jeune photographe originaire de Baltimore, présent lors des émeutes. Le message est clair : pour elle, c’est la tristesse qui l’emporte.
Les photos de Devin Allen, à retrouver sur ont fait le tour du monde. Le magazine TIME en a fait sa couverture en comparant ces événements à ceux perpétués en 1968. Beyoncé Knowles-Carter a quant à elle partagé cette couverture avec ses 32 millions de fans, sur son compte Instagram.
Même constat pour , qui fait la même comparaison sur compte Twitter:
Ou bien encore :
« SANS JUSTICE, IL NE PEUT Y AVOIR LA PAIX »
Voici la phrase clé de week-end. Ce dimanche, au Royal Farms Arena de Baltimore, à quelques pas de l’endroit d’où sont partis les émeutes et les manifestations qui ont mis la ville en feu quelques jours plus tôt, le chanteur Prince donnait un concert pour la paix. On le sait peu engagé politiquement d’ordinaire, mais l’artiste a tenu à présenter lors de ce « Rally 4 Peace » une nouvelle chanson intitulée « Baltimore » en hommage à la ville. Dans ce titre, il appelle à la paix et évoque Freddie Gray ainsi que Michael Brown : les deux jeunes tués de trop.
Verrons-nous d’autres jours sanglants ?
On n’en peut plus de pleurer, de compter les morts
Confisquons les armes
Aucun téléphone portable n’était autorisé dans la salle, aucun enregistrement de quelconque nature non plus. La justification à cela : le moment est trop important pour être parasité par des flashs incessants de smartphone. Tous les spectateurs invités à porter du gris ont pu brièvement acclamer la jeune procureur afro-américaine Marilyn Mosby invité sur scène comme un message d’espoir, à l’origine de l’inculpation des six policiers impliqués dans la mort de Gray.
Ce même-soir, d’autres célébrités étaient présentes pour soutenir la ville de Baltimore. Jay Z, sa femme Beyoncé et Alicia Keys ont assisté à cet événement et ont ensuite rendu visite aux familles des deux victimes. Comme signe de soutien, une partie des revenus du concert sera reversée à des œuvres caritatives.