De 1970 à aujourd’hui l’évolution de la soca, l’emblème musical de Trinidad & Tobago

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La musique caribéenne s’invente, se réinvente, s’exporte. Une rencontre de styles, de courants qui se métissent. Sous influence de l’Amérique Latine et des États-Unis, les sonorités caribéennes se distinguent par leur chaleur. Zouk, dancehall, reggae, kompa, soca… Préparez-vous à voyager.

Sortez les masques, videz-vous la tête, c’est le carnaval ! Dès les premières notes une irrésistible envie vous prend : danser sans réfléchir. Indissociables l’un de l’autre, carnaval et soca sont les emblèmes culturels de Trinité-et-Tobago. Socarnaval !

Originaire de l’île la plus au sud de la Caraïbe, la soca dérive du calypso (so-ul ca-lypso). Depuis les années 70 elle fait danser les îles de l’archipel et trouve ses origines au carnaval. Au départ les textes étaient engagés et décrivaient la situation sociale du pays. Tout comme le calypso critiquait à ses débuts le système colonial. L’essence du calypso et donc de la soca est en fait la même que celle du carnaval. À l’origine les esclaves parodiaient les festivités de leur maître, puis la tradition est restée jusqu’à devenir l’évènement majeur de l’année. Et très vite les paroles sont devenues plus légères, avec pour unique objectif : faire la fête. Ce n’est pas pour rien que le carnaval de Trinité-et-Tobago est l’un des plus prisés au monde. Des chars avec sono surpuissante, des carnavaliers déchainés, des costumes plus colorés les uns que les autres. Pendant trois jours, tous les problèmes sont mis de côté. Les rythmes endiablés propre à Trinité-et-Tobago n’ont pas tardé à se diffuser dans toute la Caraïbe. Chaque île possède son carnaval et il est vrai que la soca se prête particulièrement bien à l’esprit de la manifestation. Moins «rangé» que ses alter egos de Rio ou Venise, le carnaval de Trinidad laisse plus de place au lâcher prise, à la participation active de la population. Et cela s’en ressent au niveau de la musique. C’est en fait l’exemple type du carnaval pratiqué dans la Caraïbe. Le calypso, antérieur à la soca, n’est pas mort pour autant. Mais le rythme de la soca plaît davantage à un public jeune, plus à même d’enflammer les rues de la capitale, Port-d’Espagne.
40 ans et pas une ride
Aujourd’hui la soca dépasse le simple cadre du carnaval et s’affiche comme l’ambassadeur musical de Trinité-et-Tobago. Les Machel Montano ou Destra Garcia exportent leur style dans le monde tout au long de l’année. Plusieurs tendances existent au sein de la soca : le jump up très énergique, le ragga soca influencé par la Jamaïque… Certains morceaux ont contribué à faire connaître la soca en dehors de la Caraïbe. « Soca dance » de Charles Lewis (tube en France) et « Follow the leader » des Soca boys sont de ceux-là et ont marqué les années 90. Des morceaux qui peuvent paraître un peu « kitch » aujourd’hui comparés aux récents hits. Mais qu’importe, les stars du moment leur doivent beaucoup. S’exporter signifie aussi s’ouvrir aux autres et la soca évolue grâce à l’influence d’autres styles. D’autant plus que les combinaisons avec des artistes, des musiques voisines sont monnaie courante. La musique caribéenne bien que diverse sait se rassembler. Destra avec le chanteur de dancehall Saïk, Machel Montano avec Major Lazer… Et malgré cette évolution vers l’international, elle reste très appréciée des carnavaliers. Il existe même un concours du meilleur groupe de soca du carnaval, le « Soca Monarch ». Mais ce n’est qu’un des multiples concours qui jalonnent le carnaval de Trinité-et-Tobago.
Et parmi ces nombreux concours : la Queen of Carnival (reine du carnaval). Un titre prestigieux et convoité par de nombreuses Trinidadiennes. C’est l’histoire que conte Destra, la «Queen of Bacchanal», à travers LE morceau de soca de ce début d’année : Lucy, ou l’histoire d’une jeune femme qui rêve de devenir la reine des festivités. Cette gentille fille qui ne sort jamais mais qui est prête à se lâcher pour s’attribuer ce titre. Et ce n’est pas peu de le dire. Émerveillée par les prétendantes, elle compte bien s’en inspirer pour arriver à ses fins. Une histoire tout en rythme et représentative à la fois du carnaval et de la soca. Clip équivoque à la clé.

Playlist – Socarnval :

Sur l'auteur

Yohann Charpentier-Tity

Mi Martiniquais, mi Guadeloupéen. Français d’Outre-Mer, Antillais, Caribéen… De Fort-de-France à Paris, de mon île au continent. 23 ans à porter fièrement mon patrimoine, ma culture.